Cosmétiques naturels et bio : Quelles sont les différents moyens de conservation et que signifie «UHT» ?

Juillet 2014

Les conservateurs peuvent potentiellement être dangereux pour la santé. Voir à ce sujet l’article  suivant « Du Methylisothiazolinone à la place des parabènes ?  que vous trouverez prochainement dans l’onglet des articles
 
De quelle manière sont conservés les produits en cosmétique naturelle et bio certifiée ?
Les différents fabricants utilisent des approches diverses. Il existe une nouvelle méthode, -la conservation UHT-, qui se passe de conservateurs et de moyens de conservation comme l’alcool, mais qui n’est utilisée jusqu’à présent que par quelques marques, notamment Dermatherm et Gravier.

La conservation: un défi, résolu de manières très différentes

Chaque produit cosmétique doit être microbiologiquement stable. C’est -à- dire qu’après ouverture du contenant, il ne faut pas qu’il y ait prolifération de trop de micro-organismes comme des bactéries, des levures ou des moisissures. Ces micro-organismes ne peuvent pas vivre sans eau, mais la plupart des cosmétiques en contiennent. Donc il est nécessaire de choisir un mode de conservation.

  • En employant les grands moyens de la chimie, il est facile d’assurer la conservation d’un produit. Avec l’un des premiers conservateurs employés, le formaldéhyde, tout marchait à merveille. Même à petite dose, il est déjà extrêmement efficace, mais aussi extrêmement dangereux comme on le sait maintenant. Entre-temps, il a été classé dans la catégorie des substances cancérigènes.
  • Tout responsable compétent d’un département de recherche et développement sait qu’il n’existe pas de conservateurs non problématiques. Les conservateurs doivent détruire les micro-organismes et remplissent ainsi leur fonction. Mais chaque produit qui détruit les micro-organismes peut s’avérer agressif pour la peau et même dangereux pour la santé, s’il n’est pas soigneusement dosé et s’il n’a pas été testé quant aux effets secondaires indésirables.

Les concepts de conservation des fabricants de cosmétiques naturels et bio

Jean-François Gravier est Directeur des Laboratoires Gravier. Les Laboratoires Gravier fabriquent des cosmétiques naturels et bio depuis 1975. Jean-François Gravier : «Depuis toujours, l’Homme cherche à conserver notamment son alimentation plus longtemps ; les méthodes les plus connues sont : le sel, l’alcool, la fermentation, le froid, le fumage, la dessiccation, … » Pour les pionniers des cosmétiques naturels et bio, la question de la conservation fut le plus dur des challenges des années 1960/1970. Un travail de développement de plusieurs années et beaucoup d’expérience furent nécessaire pour arriver à de bons résultats, et pour pouvoir concevoir même des produits sans conservateurs de synthèse.

  • Ce qu’il faut faire pour garantir la stabilité microbiologique d’un produit dépend d’une série de facteurs: de la formulation du produit, de sa production et d’un troisième élément – non des moindres – du type de conditionnement.

Il existe des méthodes de conservation très variées en cosmétique naturelle et bio.

Parmi les marques pionnières de la cosmétique naturelle et bio on trouve des approches très différentes, même encore aujourd’hui.

Possibilité n°1 en cosmétique naturelle et bio certifiée : la conservation avec des substances de synthèse

Jean-François Gravier: « En cosmétique, tous les cahiers des charges bio acceptent les conservateurs de synthèse de type acide sorbique, acide déhydroacétique, l’acide benzoique, etc. Tous ces conservateurs font partie d’une liste officielle : ce sont les conservateurs listés, au nombre de 57 aujourd’hui, avec une évolution prochaine. » 
Un grand nombre de fabricants en cosmétique naturelle et bio certifiée utilisent ce type de conservateurs. D’autres ont fait le choix de privilégier d’autres méthodes.

  • Les marques allemandes pionnières de la cosmétique naturelle et bio comme par exemple Weleda, Logona, Dr. Hauschka ou Lavera avaient fait le choix, -et le maintiennent jusqu’à aujourd’hui-, de se passer des conservateurs de synthèse autorisés en cosmétique naturelle et bio. A la place, ils ont développé un système de conservation différent.

Possibilité n°2 : Assurer la conservation sans conservateurs de synthèse

Assurer la conservation sans conservateurs de synthèse nécessite tout un ensemble de mesures. Un facteur essentiel : faire en sorte que le moins de micro-organismes possibles ne puissent se développer lors de la production ou du conditionnement, ou pénétrer dans le produit au moment de l’utilisation. Mieux l’on réussit, moins l’on a besoin de conservateurs.

  • Les fabricants qui n’utilisent pas de conservateurs de synthèse ne peuvent généralement pas se passer de matières premières conservatrices, notamment de l’alcool. Les huiles essentielles et certains extraits peuvent également avoir des propriétés conservatrices.
  • Les huiles essentielles ne peuvent par contre que jouer un rôle secondaire dans la conservation du produit, car un dosage plus élevé avec certaines huiles essentielles peut augmenter le risque de réaction allergique.

Est-ce que les conservateurs de synthèse autorisés en cosmétique naturelle et bio certifiée sont mieux que l’alcool ?

Il n’y a pas de chiffrage ou d’étude comparative exploitable. Ce qui reste valable de manière générale : aucune substance à action conservatrice n’est libre de tout soupçon. Chaque matière à effet conservateur a ses avantages et ses inconvénients.
Même les conservateurs autorisés en cosmétique naturelle et bio, comme par exemple l’acide salicylique, peuvent provoquer des réactions cutanées.

  • Est-ce que l’alcool pose problème ? Employé à de hautes doses, il peut avoir un effet négatif sur le film hydrolipidique de la peau et la dessécher. Mais c’est exactement ce que les fabricants responsables ont étudié et pris en considération.
  • Si de l’alcool est employé pour faire partie de la conservation, il est en général dosé de façon à être en accord et supporté selon le type de peau.
  • Pour les cosmétiques naturels et bio, la seule alternative à ces substances à effet de conservation secondaire, étaient jusqu’à présent les conservateurs autorisés dans les cahiers de charges. Mais l’alcool a un grand avantage : il est naturel. La plupart du temps, on utilise même de l’alcool issu de l’agriculture biologique. Et tous les conservateurs autorisés par les labels sont des substances de synthèse (chimiques).

Certaines autres méthodes ne sont pas idéales ou seulement adaptées pour certains produits.

Il existe aussi d’autres moyens pour conserver les cosmétiques sans conservateur classique. Monsieur Jean-François Gravier explique à ce sujet :

  • « Dans les années 80, on a essayé le froid, avec une conservation de 1 à 2 semaines, incompatible avec un usage moderne.
  • On peut aussi utiliser la concentration, produits avec très peu d’eau, le meilleur exemple étant le savon.
  • On peut également jouer sur le pH : en dessous de 3 et au dessus de 10, la prolifération bactérienne est très fortement inhibée ; inconvénient de cette méthode, on est loin du pH physiologique.
  • La fabrication stérile de A à Z avec des matières premières stériles (exempt de micro-organismes), en salle stérile ; inconvénient de cette méthode, les substances naturelles ne sont pas stériles et les contraintes techniques (salle iso 5 sur toute la chaine) sont très contraignantes. De plus, pour rendre les matières premières stériles, on stérilise au rayonnement gamma.
  • La stérilisation gamma est une autre méthode de conservation en tuant toutes les bactéries. Méthode utilisée pour éliminer les bactéries en cosmétique classique quand un lot est contaminé. « 

Une méthode sans aucun conservateur : UHT

On connait le procédé UHT-(Ultra-High-Temperature) surtout par le biais de la stérilisation du lait (le lait UHT). Monsieur Gravier nous explique les avantages que peut représenter ce procédé :

« Depuis quelques années, il se développe une nouvelle méthode pour avoir des cosmétiques sans conservateur : la méthode UHT, brevet français récent, utilisé par quelques grands groupes, Dermatherm et le laboratoire Gravier.

  • Cette technique unique au monde est malheureusement peu utilisée encore dans le milieu de la bio, ce qui est dommage. Les grands groupes ont compris l’intérêt de cette technologie pour supprimer totalement tous les conservateurs qu’ils soient listés ou non.
  • La contrainte majeure de cette technologie est l’usage d’une salle iso 5 pour le conditionnement. Ayant des produits réellement sans conservateur, il faut conditionner en salle stérile pour éviter toutes les contaminations. Supprimer tous les conservateurs est la tendance actuelle, notamment pour les produits bébé pour avoir des produits plus ‚safe’. D’ailleurs, la réglementation va dans ce sens. »

Pour quelle raison la méthode UHT n’est-elle pas utilisée par tous les fabricants en cosmétique naturelle et bio ?

Tout simplement parce que c’est lié à des transformations et des changements de fonctionnement importants. Même les fabricants les plus importants de la cosmétique naturelle et bio restent des petites entreprises, comparé au secteur conventionnel. La plupart de ces entreprises sont même très petites. On sous-estime souvent l’effort que cela représente de passer à un système de conservation différent.

  • On oublie par exemple qu’il faut généralement revoir l’ensemble des formules. Le fait de supprimer juste quelques substances n’est tout simplement pas suffisant et risquerait de déséquilibrer l’ensemble de la formulation.
  • Il serait tout à fait souhaitable qu’un jour la cosmétique se passe de toute sorte de conservateurs. Mais aujourd’hui nous sommes encore loin de cet objectif. Dans la réflexion autour de ce sujet, il ne faudrait pas perdre de vue que la cosmétique naturelle et bio certifiée n’a jamais autorisée ou employée de conservateurs problématiques tel des composés organo-halogénés ou des libérateurs de formaldéhyde.

Que ce soit la méthode UHT ou par le biais de formulations spécifiques, les cosmétiques sans conservateurs sont un vrai plus

Les cosmétiques sans conservateurs représentent un réel avantage, sans aucun doute. Surtout dans les produits pour bébé et les produits pour peaux très sensibles.